PODCAST. Varsovie, en Pologne, par un après-midi de Printemps. Un groupe d’une vingtaine de personnes se dirige vers le musée de l’Histoire des Juifs de Pologne. La plupart sont professeurs d’histoire-géographie. C’est le département des Alpes-Maritimes qui leur a proposé ce voyage d’étude, pour se perfectionner et surtout mieux appréhender une partie de leur programme: la seconde guerre mondiale et en particulier la Shoah.
La Shoah, c’est 5 à 6 millions de juifs qui ont été exterminés dont plus de la moitié en Pologne où plus de 90% des juifs Polonais ont été tués. Le musée de Varsovie retrace leur histoire de leur arrivée dans ce pays d’Europe de l’Est il y a presque 1000 ansjusqu’à leur extermination pendant la seconde guerre mondiale.
Malgré l’horreur du sujet. Roger Wolman, 85 ans, est malgré tout satisfait d’accompagner ces professeurs pour ce voyage, tout comme Daniel Wancier, 84 ans. Tous deux sont ce que l’on appelle des enfants cachés. Ils ont été séparés de leur famille pendant la guerre pour leur éviter la mort parce qu’ils sont juifs. Pour Roger Wolman, la transmission aux jeunes générations est indispensable.
Au programme de ce voyage d’étude bien ficelé, Varsovie et son ghetto où étaient regroupés des dizaines de milliers de juifs.
Mais aussi Lublin avec son camp de concentration et d’extermination de Majdanek à deux pas du centre-ville. A Majdanek. Le lieu est aussi verdoyant que terrifiant. Les baraquements sont presque intacts. On aurait presque l’impression que le camp est simplement en sommeil. Là, des juifs faits prisonniers travaillaient, alors que les plus jeunes, les plus vieux, les malades et les autres – au bon vouloir des nazis – étaient gazés. Près de 80 000 personnes dont 60 000 juifs ont été tués dans ce camp, qui a aussi connu la terrible Aktion Erntefest « la fête des moissons » en novembre 1943, une opération pendant laquelle au moins 17 000 prisonniers juifs ont été fusillés en moins de 48h, dans des fosses creusées à cet effet. Et pour couvrir les hurlements et les coups de feu, deux véhicules diffusaient de la musique sur des hauts-parleurs…
Le camp de Treblinka lui, en revanche, a été entièrement détruit par les nazis pour tenter de ne laisser aucune trace. Mais les témoignages ont permis de reconstituer, en maquette, le site. Un site en pleine forêt, particulièrement émouvant pour les deux enfants cachés qui accompagnent le voyage, tous deux découvrent ce mémorial pour la première fois. Certains de leurs ancêtres sont morts ici, explique Daniel Wancier « mes grands-parents maternels, oncles, tantes ont été tués, ils n’ont pas de sépulture. Ils sont partis dans la fumée des fours crématoires ». Roger Wolman explique que son « grand-père était ici, certainement venu de Varsovie et on l’a amené ici pour le mettre à mort. Ici, l’humanité s’est déshonorée. On ne peut jamais se relever de ce qui a été fait ici et dans tous les camps de Pologne. Jamais ».
Une fois arrivés au centre du mémorial. Daniel et Roger mettent leur Kippa sur la tête. Et c’est là qu’ils rendent hommage à leurs ancêtres. Daniel Wancier parle en yiddish, la langue germanique des Juifs. Là, Daniel Wancier est secoué par l’émotion qui prend le dessus d’ailleurs sur la plupart du groupe. Le moment est difficile, les larmes se mettent à couler. L’humain vient de rattraper l’horreur des livres d’histoire.
Au cours de ces 4 jours de voyage. Le bus sert parfois d’exutoire. L’ambiance y est plus détendue. Forcément, on a envie d’y penser à autre chose. Beaucoup imaginent aussi à comment ils vont transmettre tout cela à leurs élèves. Quoiqu’il en soit, le pari est réussi. Ce genre de voyage aide clairement les professeurs à mieux appréhender ce délicat et difficile sujet de la Shoah. Le département des Alpes-Maritimes, qui organise depuis plusieurs années déjà des voyages de la Mémoire pour les collégiens à Auschwitz-Birkenau, compte bien renouveler ce genre de déplacements dédiés, là, surtout aux professeurs.
JT